Transhumances pastorales et aires protégées en Afrique centrale : des conflits à une cohabitation apaisée intervient dans la seconde partie de l’État des aires protégées en Afrique centrale 2020 : enjeux et perspectives consacrée aux priorités du développement durable. L’ambition textuelle s’affiche dès l’énoncé du titre. Il s’agit de sortir des sentiers et des idées reçues, de bien cerner ce qu’évoque précisément la transhumance pastorale, de partir des rapports conflictuels entre divers acteurs pour aboutir à des interactions sans heurts grâce au recours à des approches plus génératrices de paix développées dans le volet des recommandations.
L’originalité de l’étude s’établit dans une géographie particulière des aires protégées : les marges. Le chapitre examine ainsi des territoires qui ne sont pas au cœur de celles-ci comme c’est le cas dans la plupart des autres chapitres. La périphérie des aires protégées représente tout un monde de complexités le plus souvent en état de choc les unes contre les autres. Ces frontières entre les aires protégées et la vie ordinaire font l’objet de nombre de convoitises. Ce sont des réserves alimentaires et des réservoirs de ressources indispensables à l’élevage transhumant. L’activité en soi, gage d’un succès économique franc au sein de la sous-région pour les trésors publics, répond de 35% du produit intérieur brut agricole, PIB A, et 5,8% du PIB ordinaire. La colonisation de l’interface des aires protégées par les non-conservateurs obéit à des besoins d’adaptation à des contraintes structurelles propres aux sociétés pastorales, à l’insécurité qui s’étend sur ces espaces marginalisés et à des incertitudes climatiques faites de la chute drastique de la pluviométrie, de la montée des températures et de l’assèchement des pâturages.
L’occupation de la lisière des aires protégées en territoire d’attache ou de rattachement occasionnel est conflictogène. Les zones tampon sont des lieux intégrés au sein de parcours de transhumance reliant pâturages, points d’eau et marchés, suivant les déplacements réguliers ou saisonniers du bétail. C’est un héritage qui date du 18è siècle. Les interfaces des aires protégées deviennent ainsi des théâtres de conflits. Ils opposent les éleveurs, les agriculteurs et les agents de conservation à cause du contrôle de l’accès à l’eau, de la dégradation des habitats de la faune sauvage et du braconnage. Dans certaines circonstances, le péril sécuritaire prend des allures de front des opérations avec l’intervention de groupes armés, recherchant eux aussi une place au sein de ces larges espaces peu peuplés et faiblement contrôlés par les Etats.
Transhumances pastorales et aires protégées en Afrique centrale : des conflits à une cohabitation apaisée œuvre à la décrispation des rapports entre les acteurs de terrain. Le chapitre articule un mode d’emploi indispensable à l’avènement des co-existences pacifiques. Il invite à l’intégration du pastoralisme transhumant dans la gestion des aires protégées comme solution aux tensions locales. En d’autres termes, les communautés ont besoin d’être mobilisées en vue de leur participation effective à la planification de la conservation. Une telle démarche aurait le mérite de consolider le sentiment d’appartenance et de légitimité recouvrée dans la conduite des œuvres de conservation.
La présente étude développe tout un argumentaire favorable à l’exploitation sans délais de nombre de supports de promotion de la paix au sein des interactions menées à la lisière des aires protégées. L’élaboration des chartes d’engagement intervient en premier. Les adhésions volontaires traduiraient la détermination des parties prenantes à poursuivre des objectifs partagés lors de la planification, de la mise en œuvre et même de l’évaluation de la gestion des aires protégées.
Le deuxième outil de promotion de la paix concerne les plans d’utilisation des terres. Ils sont conçus de manière participative et intègrent les considérations spatio-temporelles des transhumants. Au lieu d’exclure, les plans d’aménagement des aires protégées doivent aussi traiter des parcours de transhumance et aider à entretenir ou à stabiliser les pâturages et les points d’eau sans omettre les investissements en termes de biens sociaux de base comme les écoles et les infirmeries.
Les sources d’information représentent les troisièmes instruments de paix. Les agents de conservation sont encouragés à développer des contacts dignes de confiance avec les transhumants à l’effet d’obtenir des informations de première main. Elles sont indispensables dans les opérations de lutte contre le braconnage et la grande criminalité. En effet, l’information, c’est déjà le pouvoir. Les transhumants se constituent en première ligne de défense grâce à leurs pratiques spatiales, capables de couvrir de vastes territoires, des zones grises qui peuvent parfois paraître inhabitées.
La diplomatie locale désigne le quatrième outil de promotion de la paix. Elle a besoin d’un regain de légitimité pour redevenir conquérante. Les agents de conservation sont invités à apporter des appuis et à consolider les institutions traditionnelles. Elles ont toute leur importance dans l’élaboration et le suivi des accords d’exploitation des ressources naturelles. Il est indispensable de les intégrer dans les plateformes élargies. C’est en vue de l’identification collective des solutions aux problèmes d’utilisation partagée des ressources et des espaces.
Les accords frontaliers, cinquième et dernier outil de promotion de la paix, relient les territoires locaux de manière à englober les aires protégées et leurs périphéries avec les espaces vécus par les transhumants.
L’Etat des Aires Protégées 2020
Cet ouvrage répond aux besoins de la présentation d’un bilan des réseaux d’aires protégées des pays d’Afrique centrale. L’EdAP 2020 présente la situation des aires protégées d’Afrique centrale en 2020 et neuf autres chapitres basés sur des expériences et des études de cas dans et autour des aires protégées de la sous-région, organisés en deux sessions:
- la « Gouvernance des aires protégées en Afrique centrale » et
- le « Développement durable et aires protégées en Afrique centrale ».
L’ouvrage sera publié en français et en anglais et sera disponible à partir de mars 2021 !
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